Apologie d'un Féca.

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Prologue

Mes yeux cernés de noir m'ont permis de voir le jour. Mes oreilles innocentes m'ont permis d'entendre les souffrances. Ma bouche charnue m'a permis de prononcer mon apologie.
Apologie d'une existence infâme, apologie d'un sommeil où les songes sont néants, et dont je ne me réveille jamais. Apologie d'une vie sauvage au milieu des créatures les plus maléfiques que même Rushu n'oserait imaginer.

Il y a tant d'hommes et pourtant aucun ne me ressemble. La vie m'a montré que croire ne servait à rien. Je suis seul, et pourtant je compte mes compagnons par dizaines. Les Chevaliers Célestes. Est-ce une secte, est-ce une guilde, est-ce un groupe éphémère formé pour voir nos destins croiser ceux de personnes dont l'existence nous était inconnu ? Mais au fond de moi mon coeur est seul. Il est seul et la beauté me le fera oublier.

Ceci est mon histoire, mon apologie, mon chemin retracé sous ma plume. Mes pensées noires ne me feront pas oublier qui je suis, ni qui vous êtes. Au-delà de moi je suis ce personnage si mystérieux. Vous me découvrez à chaque instant que je me découvre moi-même. Mon nom est Dir en Grey.

Chapitre 1 - Le réveil

Que se passe-t-il ? Où suis-je ? Des cris de joie se mêlent aux sanglots d'une femme.
"Cet enfant, nous ne le nommerons pas. Il n'aura aucune identité. Il sera le vent, il sera la pluie. Il sera celui-ci que l'on redoute mais que l'on ne voit jamais."
Je venais de naître. Comme toute existence, à ce moment précis de ma vie, alors que je venais de voir le jour, j'étais pressentis à mourir. Maintenant, dans dix ans, dans cent ans, quelle importance ? Qu'est-ce que le monde retiendra de ma venue ? C'est pourtant dès ce moment-là qu'on comprend que notre unique but est de chercher à vivre. Pourquoi, je ne le sais pas. Je pense que personne ne le sait. Au bout du compte, on vit pour vivre, sans aucun but. On vit pour connaître la joie, la gloire, la haine, qu'elle se répercute sur notre entourage. Celui-ci qui n'apportera rien non plus.

Je suis né de père Féca et de mère Ecatte. Je ne les ai pas connu. Certains auront pitié de moi mais au fond de moi j'imagine que c'est mieux comme ça. Je crois que c'est ce que l'on essaye de se dire lorsqu'on vit le désarroi.

Comme tout être humain je ne me souviens pas de mes premières années. Les quelques cicatrices que je porte ci et là ne m'en donnent pas une bonne impression. J'imagine qu'il est préférable d'avoir oublié cette période. C'est toujours celà de moins.

Dès mon plus âge je me suis posé des questions, sans n'avoir jamais pu y répondre. Je me les pose encore aujourd'hui. Je n'ai eu - et encore aujourd'hui - personne à qui poser ces questions. Je suis toujours resté dans l'ignorance. Les débuts furent difficiles. Un Féca sans armure n'est ni plus, ni moins, un Iop sans son épée. J'errais un peu partout. Les arbres brûlés et dénudés me sont restés gravés dans la mémoire, je pense avoir vécu dans les Landes de Sidimote.
Cette période de mon existence, je ne cesse de vouloir l'oublier, car elle me fait souffrir. Je n'ai jamais été très bon pour oublier le passé. En fait, je crois que l'avenir me fait peur.

Chapitre 2 - Le début de la fin

Un jour que j'errais seul, j'entendis des voix. Mes jambes lourdes m'empêchaient de me déplacer convenablement mais ma curiosité pris le dessus et je mis toutes mes forces en oeuvre pour aller voir ce qu'il se passait.

Entourés de gardes Brâkmariens, des Sangliers des Plaines transportaient une multitude de personnes, de toute race, de tout âge de tout sexe. Ces gens paraissaient déprimés, abbatus. Ils semblaient porter en eux toute la misère du monde. Les gardes les injuraient. De temps à autres on entendait le claquement des fouets. Une voix derrière fois me fit glacé le sang au-délà de la peur qui m'habitait déjà. "En voila un autre", dit-elle. Un Sram Brâkmarien révéla sa présence et, sans n'avoir pu esquisser aucun mouvement, il m'emmena sur l'un des sangliers, puis le cortège repris son chemin, tandis que le Sram, invisible, repartit fouiller dans les buissons.

Près de moi un jeune Osamodas regardait dans le vide. Il ne semblait pas concerné parce qu'il se passait autour de lui. Ayant vécu seul je ne comprenais pas ce qu'il se passait et je n'osait pas demander à quelqu'un de m'éclairer.

Après quelques heures de marche et une bonne dixaine de nouveaux venus sur les sangliers, nous nous arrêtames devant un enclos. Cet enclos semblait gigantesque, un vrai petit village. Lorsque nous fûmes descendu, on nous emmena à l'intérieur de l'enclos.

"Une maison, enfin !" me dis-je.

Chapitre 3 - Rall

Il s'était passé plusieurs jours depuis mon entrée dans le camp. Au final, il n'avait rien d'un enclos et encore moins d'une maison. Tous les jours après le "repas" (une feuille de Salace et une bière de Bwork) nous étions emmené, en file indienne, pour aller travailler. C'est là que je vis, caché derrière une maisonette, l'Osamodas que j'avais rencontré sur le sanglier. Prenant mon courage à deux mains, je sortit de la file pour aller le rejoindre.
"Que fais-tu ? Tu vas te faire prendre ! dit-il.
- Et toi tu n'en as pas peur ? répondis-je.
- La mort ne me fait pas peur.
- Que faisons-nous ici ?
- Quoi tu ne le sais pas ? La nouvelle est connue dans tout Amakna. Brâkmar nous a condamné, nous pauvres Bontariens, à l'esclavage forcé.
- Pourquoi font-ils cela ?
- Mais nous avons perdu la guerre ! Bonta n'est plus rien. Rushu a le monde à ses pieds."

Je ne savais pas que les hommes pouvaient avoir des comportements si étranges. Ce visage si rond et si resplendissant, réduit à néant pour une chose dont il est absent. Ce jeune garçon me paraissait plus mystérieux qu'il ne m'inspirait de pitié.
Les histoires des humains ne m'intéressaient pas vraiment. Je préféra lui demandé ce qu'il faisait caché derrière la maisonette.
"J'invoque des petits Tofus qui s'envolent au-delà de l'enclos.
- Mais ils disparaissent après non ?
- Oui, mais l'impression de les voir s'envoler me donne de l'espoir. Une impression de liberté.
- J'ai l'impression de te comprendre.
- C'est bien la première fois qu'on me dit ça. Je m'appelle Rall. Et toi ?"

Cette question, on ne me l'avais jamais demandé. Moi-même je ne me l'était jamais posée. Mon nom, je ne le connaissais pas, je n'en avais pas. Après un moment de réflexion, je me souvint d'un mot gravé sur un arbre mort.

"Je m'appelle Dir en Grey.
- Bien, Dir en Grey, est-ce que ça te dirait de rejoindre mes Tofus ?
Un souffle d'exitation m'envahit. Je n'avais jamais vraiment participé à quelque chose.
- Je suis partant".
Rall se leva. Il tremblait mais se sentait certainement fier d'avoir eu cette idée.
"Allons-y", dit-il.

Chapitre 4 - Exil

Rall se leva, révélant son visage jusqu'alors caché dans les ombres. Nous suivîmes un étroit chemin qui passait entre les différentes maisonettes du camp brâkmarien. Après quelques minutes de marche, nous aperçûmes la sortie.
"Il est possible qu'elle aie été envahie par des Pièges de Masse.
- Comment allons nous donc faire ?
- Je vais te l'expliquer. Tout d'abord je vais invoquer un Tofu qui tu immuniseras. Celui-ci ira déminé la sortie. Puis je puiserai dans mes forces pour créer quelques Bouftous qui iront s'occuper des gardes pendant que nous nous échapperont."
Rall venait d'élaborer ce plan si ingénieux en quelques secondes. Ses pensées philosophiques reflettaient donc bien son esprit ingénieux pour son jeune âge.

Il invoqua un Tofu sur lequel je fis Immunité. Celui-ci se lança, corps et âme, vers la sortie et déclencha effectivement quelques Pièges de Masse. Les gardes, alertés, vinrent vers nous mais Rall avait déjà envoyé ses Bouftous. A l'intérieur de mon Armure Terrestre nous nous échappâmes alors à l'extérieur du camp.
"On l'a fait ! criai-je alors.
- Restons sur nos gardes, il est fort probable qu'il en reste dans le coin."
Rall invoqua aussitôt un Prespic qui se rendit invisible et partit en éclaireur.

Le voyage se passa sans aucun autre problème. Le seul soucis était que nous ne savions pas où aller.
"Toutes les Landes de Sidimote sont contrôlées par Brâkmar, dis-je. Si Bonta a été pris alors le Nord est sans espoir. Il faut regagner les zones Neutres.
- Bien, nous allons établir un plan. D'après ce que j'ai vu en venant ici, Brâkmar a poussé son avant-garde jusqu'au niveau du Village des Dopeuls, où ils ont établis une ligne fortifiée qui s'étend d'Ouest en Est. Nous ne pouvons donc pas partir des Landes en contournant la montagne. Il resterait un passage qui passe par la Fôret des Koalaks mais celui-ci est aussi gardé ...
- Je pense savoir où passer ! Au Sud-Ouest il existe un passage dans les Montagnes qui mène à la Vallée de la Mor Kithu. Brâkmar y a déjà installé un campement mais il a été rasé par les Koalaks. Mais biensûr cette Vallée est très dangereuse et il sera difficile de la traverser.
- Si c'est notre seule chance, il faut essayer. Nous n'avons pas le choix...

Rall finit de griffoner quelque chose sur sa carte abimée puis se leva et se remit à marcher ...

Chapitre 5 - Obscure

"Ca suit derrière ?"
Je sentais une pointe d'ironie dans les propos de Rall. Tranquillement assis sur son Bouftou, il me regardait, moi qui pênait à suivre la cadence.
"Aller, encore quelques mètres et nous y sommes", repris-t-il.
En effet, quelques secondes s'écoulèrent avant que je puisse apercevoir au loin un trou béant dans la montagne, ce même trou que j'avais repéré quelques années auparavant. Nous traversîmes le camp de Brâkmar, dévasté par les hordes de la Vallée. Ceci n'était guère rassurant, mais ce passage était le seul moyen pour nous de regagner les zones neutres.
"On y voit pas à un mètre dans ces grotte ! m'exclamais-je.
- Tu n'es vraiment pas très doué. Enflamme donc ton bâton avec ton Attaque Nuageuse."
Après quelques tentatives ratées, mon bâton était allumé et servait parfaitement de torche. Nous arrivîmes alors à un croisement. Aucun d'entre nous ne savais par où passer. Après quelques minutes de réflexion nous décidâmes d'emprunter la voie de gauche.

La grotte se faisait de plus en plus sombre et la torche avait du mal à contrer cette obscurité. La voie semblait interminable et se rétrécissait petit à petit. Au bout du compte nous aperçûmes une lumière. Par prudence, nous nous faisions discret, puis nous decouvrîmes un petit campement abandonné, où jonchait encore une lampe à huile. Nous décidâmes de nous y reposer. Rall alla alors s'allonger sur un tas de foin au fond de la pièce ... qui s'écroula, laissant place à un trou béant et ténébreux.
"Tout va bien ?! criai-je.
- Ca peut aller ... heureusement ce n'est pas profond. Par contre, impossible de remonter, il va nous falloir continuer par là ... si tu veux bien me rejoindre.
- Biensûr, je ne vais pas te laisser seul !"

Je sautai dans le trou et nous continuâmes notre route par un petit passage qui nous faisait face. Malgré l'étroitesse des lieux, celui-ci déboucha sur une immense et immonde pièce, où jonchaient des crânes et autres débris. Elle semblait être une grande salle de Temple, mais l'ambiance des lieux contredisait cette pensée. En me retournant, je vis que Rall tremblait. De peur, apparemment.
"Meu...Meu......Meu...... bégayait-il.
- Meu quoi ?
- Chuuut ! C'est ... c'est le Meulou !"
En effet, allongé sur une couche étonnante de peaux bêtes, dormait fièrement le Meulou. Impossible pour nous de le contourner pour rejoindre la sortie, et le chemin derrière nous menait à un cul-de-sac. Nous n'avions pas le choix de passer très près de la bête ...

Rall s'avança en voulant faire le moins de bruit possible. Je le suivait de très près. Heureusement, le Meulou semblait plongé dans un profond sommeil. Nous avancions le plus lentement et le plus discrement possible. J'avais pourtant l'impression d'être observé.
"Rall, je le sens pas ce coup-là ... chuchotais-je."

Soudainement, le Meulou ouvrit au plus grand l'un de ses yeux et nous fixa quelques secondes avant de lever son immense patte et d'abattre ses griffes sur Rall ...

Chapitre 6 - Bannis

"Yes je l'ai taclé !"
J'ouvris les yeux et vis que le Meulou ne bougeait plus. Il semblait pétrifié. La voix que je venais d'entendre provenait d'un Sram qui venait d'entrer dans la pièce, bientôt suivi par un groupe d'aventuriers.
"GG t tro for jtdr, dis un petit Xelor qui portait une panoplie Boune.
- Tais-toi le noob ! répliqua une Fécatte.
Un combat s'engagea. Jamais je n'avais vu de pareils guerriers, combattant le Meulou comme un vulgaire Piou. Pendant que le Sram taclait, ce qui lui valait de jolis coups de griffe, un Eniripsa le soigner comme il le pouvait et le reste du groupe tapait. Rall et moi, assis au fond de la pièce, regardions le combat, ébahis. Quand la bête fût tombée, le Sram se mit à lui arracher des poils et des étoffes, puis leva la tête et, avant de repartir, nous vis.
"Que faites-vous ici ?
- Nous nous sommes retrouvés là par hasard.
- Par hasard ? En plein Donjon Canidé ?! dit la Fécatte.
- Lese tombé c d noob, continua le Xelor.
- En fait ... nous nous sommes échappés d'un camp Brâkmarien et nous aimerions regagner les zones Neutres.
- Echappés ... n'est-ce pas ? dit le Sram."
Il régnait dans son regard un grande fureur. Au fur et à se mesure qu'il parlait, il devenait de plus en plus étrange, et il me semblait voir de grandes ailes rouges se déployer dans son dos.
"Et vous savez ce qu'on leur fait, à ceux qui s'échappent ?
- ...
- On les tue !"
Au moment où il prononça ces paroles, il sortit de son fourreau une Dague et se dirigea vers Rall en courant. Arrivé à quelques mètres de lui, il déploya son bras et fendit l'air.
"Immunité !!!!"
La Dague ricocha sur Rall et s'envola. Le temps que le Sram ait compris ce qu'il passe, nous courions déjà à travers le passage par lequel nous étions arrivé.
"Qu'on les suive ! Sliver, fait nous un Dragonnet qu'il aille se les farcir !", dis le Sram.

Derrière lui, un Osamodas invoqua son Dragonnet qui partit à notre poursuite, suivit de loin par les autres membres, qui se remettaient pendant ce temps tranquillement de leur combat.
"On est dans le passage par lequel on est arrivés, on va être bloqués !!!"
Arrivés au bout du chemin, nous ne savions pas par où passer. Paniqués, nous essayions de sauter par le trou où était tombé Rall, mais il était un mètre trop haut. Le Dragonnet arriva alors à notre hauteur.
"Nous sommes faits !"
Le Dragonnet chargea alors vers nous, la fin était proche.
"SAUTE !"
L'invoc' nous effleura et s'assoma contre le mur. Il faut dire que nous étions passés tout près de la mort.
"Servons-nous de son corps pour escalader !"
Après avoir glissé sur le corps à plusieurs reprises, nous réussîmes à passer par l'étroit trou au plafond.
"Ils vont quand même nous rattraper, une idée vite !"
La situation était trop critique pour réfléchir. Dans un élan de panique, je criai : "Glyphe d'Immobilisation !
- Tu n'as pas le niv..."
Une faible lueur venait de se créer au sol.
"Comment as-tu fait ça ?! repris Rall.
- Plus tard, courons !"

Nous nous remîmes à courir à toutes jambes pour échapper à nos ravisseurs. De loin, nous les entendions hurler, bloqués par la Glyphe et le corps de l'Invocation. Après environ une heure de marche, nous nous retrouvâmes au carrefour de la grotte, où nous prîmes le second chemin. Le chemin fût cette fois-ci sans encombre et bientôt celui-ci déboucha sur une vallée au sol gris et aux monstres effrayants.
"Enfin, nous y sommes ... les choses sérieuses commencent".